La psychologie du yoga, Smriti, la mémoire
Après avoir étudié les quatre premières vrittis: pramana, viparyaya, vikalpa et nidra, Kamlesh Patel nous parle de smriti, la mémoire. Il nous explique ses mécanismes, en particulier le stockage des impressions dans notre conscience et la façon dont la charge émotionnelle de nos souvenirs colore nos expériences. Il nous montre aussi comment rompre ce lien qui nous rattache au passé, pour vivre le présent de façon fraîche et renouvelée.
La science yogique de la mémoire
Essayez d’imaginer une vie sans mémoire. Comment pourriez-vous tirer les leçons de vos erreurs? Vous ne vous rappelleriez plus comment faire tout ce qui fait partie de votre routine quotidienne, comme préparer le petit-déjeuner, vous rendre à votre lieu de travail, etc. Et vous ne seriez pas capable d’établir des relations avec les personnes que vous aimez, parce que vous n’auriez pas de souvenirs communs, aucune nostalgie des jours heureux vécus ensemble. Vos chances de survie seraient sérieusement compromises, car vous reproduiriez des situations périlleuses, comme nager dans un courant dangereux, manger un fruit vénéneux ou mettre la main dans le feu. Vous ne pourriez pas apprendre un métier, car tout s’effacerait de votre esprit. Comment un médecin pourrait-il pratiquer sans aucun souvenir de l’anatomie humaine ou du diagnostic des maladies?
La cinquième vritti, la mémoire ou smriti, est donc très précieuse sur le plan pratique et pour notre survie. Même des organismes unicellulaires sans cerveau ni système nerveux central, comme les amibes, sont capables d’apprendre certaines choses par l’expérimentation, faisant ainsi la preuve qu’elles ont une mémoire. La mémoire est une fonction primitive de la conscience, indispensable à notre existence sur terre; nous nous souvenons pour survivre.
Comment le passé s’immisce dans le présent
Mais nos souvenirs peuvent aussi nous freiner et nous alourdir considérablement, et cela pour deux raisons principales. La première est que nous associons les souvenirs à des émotions; nous leur donnons une «charge», fondée sur ce que nous avons aimé ou non au fil de nos expériences. Ce sera par exemple «je déteste les orages», «j’aime les pique-niques» ou «tous les adolescents sont grossiers». À partir d’une expérience, nous extrapolons et généralisons. La seconde raison est que, du fait de ces associations, nous créons des habitudes ou des tendances comportementales. Les habitudes peuvent être utiles, mais elles nous limitent. Nous nous restreignons à ce qui ressemble à ce que nous avons vécu. De cette façon, le passé s’immisce de façon très réelle dans le présent.
Par exemple, si quelqu’un a vécu enfant une expérience traumatisante en nageant, il pourra redouter d’aller dans l’eau toute sa vie – et même dans des vies ultérieures. Si une petite fille associe l’odeur de la lavande à sa mère, à l’âge adulte elle se sentira en sécurité et heureuse auprès de toute femme qui porte ce parfum. Si les crises de colère d’un garçon lui ont permis d’obtenir l’attention qu’il désirait quand il était enfant, il pourra continuer à créer des drames dans ses relations d’adulte pour exiger de l’attention. Nos schémas se fixent très facilement, et la plupart d’entre eux sont inconscients.
Les Yoga Sutras de Patanjali
Dans ses Yoga Sutras, Patanjali décrit ainsi la cinquième vritti:
1.11 Anubhuta vishaya asampramoshah smritih smritih
La mémoire est liée au fait que les vrittis créées par nos perceptions ne disparaissent pas, mais forment au contraire des impressions susceptibles de remonter à la conscience. Le souvenir, c’est le retour à la conscience d’impressions inscrites en elle par des expériences passées.
La mémoire se crée parce que l’expérience se dépose dans le champ de la conscience sous forme de schémas vibratoires. C’est ce que le yoga appelle les impressions, ou samskaras. Le souvenir est un rappel de ces impressions stockées.
Deux processus se déroulent en continu: nous faisons constamment le lien entre nos sentiments et expériences du moment et ce qui s’y apparente dans le passé. C’est ainsi que le passé est projeté dans le présent et colore notre expérience.
Tout l’effort du yoga consiste à supprimer les obstacles, les choses qui nous lient et nous retiennent – particulièrement la charge émotionnelle des souvenirs – afin que nous redevenions comme des petits enfants.
Patanjali classe les vrittis en deux catégories: colorées (klishta) ou incolores (aklishta), c’est-à-dire impures ou pures. Et c’est tellement vrai des souvenirs! Dans Le fleuve de la conscience, Oliver Sacks donne des exemples documentés qui montrent comment des souvenirs de situations et d’événements sont déformés; de nombreux facteurs interviennent pour les fausser, notamment le mélange de divers souvenirs au cours du temps, les colorations émotionnelles que nous leur donnons, et ce que disent d’autres personnes de ces circonstances passées. En fait, il existe toutes sortes de colorations. Nous accumulons une bibliothèque d’impressions qui interagissent les unes avec les autres, créant des souvenirs réels et d’autres imaginaires. Nos souvenirs se sont colorés. Avec le temps, le mental ressemble à la toile d’un peintre recouverte de couches successives de peinture qui se mélangent. Et il n’y a plus de pureté ni de clarté dans le mental.
Comparez cela avec le mental encore frais et clair des petits enfants. Ils sont si pleins de vie, si émerveillés, si ouverts dans leur approche du monde. Ils ne sont pas enlisés dans les souvenirs. Rien ne teinte leur vision du monde. C’est pourquoi le yoga attache tellement d’importance à la régulation du mental par la pratique méditative et l’élimination des impressions. Tout l’effort du yoga consiste à supprimer les entraves, les choses qui nous lient et nous retiennent – particulièrement la charge émotionnelle des souvenirs – afin que nous redevenions comme des petits enfants.
Patanjali nous dit encore ceci:
4.6 Tatra dhyana jam anasayam
De tous les types de conscience que l’on observe, seul l’état originel qui se révèle dans la méditation est exempt d’impressions latentes et de désirs.
Il existe sans aucun appui, sans motivation – il est sans désir.
Cet état originel est le but du yoga: nous aspirons au dévoilement de ce qui existait avant la création, à l’état de samadhi, l’état sans pensée. Il était là avant que ne se crée au fil du temps notre propre écologie intérieure. Dans l’état de samadhi, nous sommes totalement dans le présent. Il n’y a pas de pensée, nous ne sommes que témoins.
De fait, la méditation est l’abandon de la pensée. Ce concept très important, qui est au cœur même du yoga, met en évidence le rôle central que la méditation y joue. Dans la méditation, nous apprenons à lâcher la pensée et à n’être que témoins. J’y reviendrai.
Aussi le yoga ne peut en aucun cas être associé à un système de croyances ou à une religion – car toutes les religions exigent langage, dogme et croyances, alors que l’état originel est au-delà de tout cela.
Patanjali poursuit:
4.9 Jati desha kala vyavahitanam api anantaryam api anantaryamsmriti samskarayoh eka rupatvat
Puisque les souvenirs et les impressions profondes (les samskaras) ont la même forme, la relation de cause à effet continue d’opérer, même en un tout autre lieu, un autre temps et une forme de vie différente.
En d’autres termes, il y a continuité. Nous pouvons mourir et renaître dans un autre corps, à un autre moment, ailleurs, mais seul le corps physique disparaît – les corps subtils et le corps causal demeurent. Et les corps subtils emportent d’une vie à l’autre les impressions qui entourent l’âme.
C’est pour cette raison que certaines personnes se souviennent d’éléments de leurs vies antérieures, comme le montrent les recherches effectuées par des psychiatres tels que le Dr Brian Weiss. Et c’est aussi pourquoi les impressions de nos vies passées peuvent nous influencer, sans que nous en soyons conscients.
Lorsque nous avons transcendé le mental en samadhi, nous n’avons plus besoin de renaître. Nous sommes alors libérés – car il n’y a plus de désirs à satisfaire. Nous avons atteint l’état originel d’avant la création.
Éliminer la cause profonde
4.10 Tasam anaditvam cha ashisah nityatvat
Il n’y a pas de commencement à ce processus d’impressions profondes, car le désir de vivre heureux est éternel.
Chaque nouvelle expérience se construit sur les tendances établies par les expériences passées. Il n’y a pas de commencement au désir, ni à l’envie d’être heureux. Observez vos désirs. Si vous êtes attentifs à la façon dont ils influencent vos comportements, vous comprendrez vite pourquoi il est si nécessaire de les éliminer de votre champ de conscience. La bonne nouvelle est qu’il y a une fin aux désirs, grâce à la pratique du yoga.
À mesure que l’énergie se dégage de vos désirs – par l’élimination des nœuds vibratoires, ou complexités, dans le champ de la conscience – elle devient disponible pour vous aider à vous élever toujours plus haut. Et à mesure que ces nœuds de désir sont éliminés, votre énergie peut s’élever suffisamment haut pour vous permettre d’atteindre la vitesse de libération.
4.11 Hetu phala ashraya alambana samgrihitatvat esam abhave tad abhavah
Du fait que les nœuds d’énergie des impressions sont soumis à la loi de cause à effet, les effets disparaissent en même temps que les causes.
Qu’est-ce que Patanjali entend par là? Les effets dont il parle sont nos réactions émotionnelles. On peut avoir peur, être en colère, jaloux, anxieux, s’apitoyer sur soi-même ou avoir du ressentiment, ou on peut être bon, compatissant, aimant, généreux et indulgent. Quoi qu’il en soit, ce ne sont là que les effets de causes sous-jacentes qui se trouvent dans notre système. Quelles sont ces causes sous-jacentes? Ce sont les impressions samskariques dans notre champ de conscience.
Il est important de comprendre qu’on ne peut pas éliminer les effets en s’efforçant de les modifier. Si vous abattez des arbres mais laissez les racines intactes, la plupart repousseront. De même, si vous essayez de changer des comportements extérieurs sans supprimer les samskaras sous-jacents, ces comportements réapparaîtront dès que les circonstances s’y prêteront.
Une cocotte-minute prête à exploser
Tenter de contrôler ses émotions est un bon début – il est bon d’être conscient de ses schémas comportementaux et de vouloir les modifier, comme par exemple apprendre à gérer sa colère. Mais c’est encore s’attaquer au problème à l’échelon cosmétique et superficiel. C’est d’ailleurs pour cette raison que l’approche médicale de la maladie mentale a des limites, et que nous connaissons une épidémie mondiale de dépression.
Les médicaments et les changements de comportement ne peuvent que tenter de contrôler les symptômes, c’est-à-dire les effets. Ils ne peuvent pas traiter la cause d’origine. Il faut davantage. Nous avons donc besoin de quelque chose qui agisse au niveau le plus profond, telles que les pratiques Heartfulness, en supprimant les causes originelles.
Pour que le changement soit permanent, les samskaras originels, ou nœuds d’énergie, doivent donc être éliminés. Si vous continuez à ne faire que contrôler les émotions, elles s’accumuleront dans votre subconscient, et vous finirez par avoir en vous une cocotte-minute prête à exploser. La pratique Heartfulness a l’effet opposé, elle nous libère des effets en supprimant la cause profonde.
4.12 Atita anagatam svarupatah asti adhva bhedat dharmanam
Le passé et le futur coexistent dans le présent, mais nous ne pouvons pas en faire l’expérience, car ils ont des caractéristiques différentes de celles du présent; ils existent sur d’autres plans.
En général, nous sommes inconsciemment influencés par le passé et nous anticipons l’avenir. Mais quand notre conscience est pure, nous voyons l’éternité telle qu’elle est –éternellement dans l’instant présent. Pour la plupart, nous nous limitons à la mince couche de conscience que nous utilisons, et par conséquent nous ne comprenons pas la relation entre passé, présent et futur, entre subconscient, conscient et supraconscient.
Dans la méditation Heartfulness, nous apprenons à élargir notre conscience et à la rendre infinie. Grâce particulièrement à la transmission yogique, ce qui était subconscient, c’est-à-dire au-dessous de la conscience, s’éclaire dans la conscience. Et ce qui était supraconscient, c’est-à-dire au-dessus de la conscience, s’éclaire aussi. Nous ne sommes plus contraints de compartimenter ces trois parties du spectre de la conscience, et ainsi l’inconscience de ce qui se passe en nous diminue.
Bien sûr, les fonctions autonomes du mental – la respiration, la digestion, la circulation du sang et le traitement de tous les stimuli que nous recevons – restent inconscientes, et c’est bien ainsi. Mais les émotions liées à la mémoire peuvent être enlevées, et les changements de comportement prendre réellement effet.
L’observateur et le témoin
Une fois que nos «j’aime» et «je n’aime pas» sont modifiés par les pratiques méditatives Heartfulness et les changements de style de vie qu’elles permettent, nous apprenons à être un témoin qui n’interfère pas, plutôt qu’un observateur. L’observation – parce qu’elle implique des impressions – est influencée par les préjugés liés aux informations et aux conditionnements antérieurs. Elle est constamment soumises à des interférences. C’est à cela que fait référence le principe d’incertitude de Heisenberg. En tant qu’observateurs, nous sommes toujours impliqués, car notre attention se polarise d’abord sur ce que nous aimons ou n’aimons pas, et c’est sur cette base que nous jugeons et intervenons. L’observation n’est jamais simplement passive ou réceptive, elle est orientée vers un but, comme la méthode scientifique, où nous avançons à partir de nos hypothèses, c’est-à-dire des idées préconçues basées sur nos observations. Le mental observateur cherche un résultat, il ne peut être ni passif ni désintéressé.
Faites la comparaison avec le témoin, qui est neutre. En tant que témoins, nous ne participons pas. Nous ne sommes pas impliqués. Nous n’avons pas d’intérêt direct à la situation, tout en y étant pleinement attentifs. Nous n’interférons pas, nous n’avons ni attentes ni exigences. Dans cette attitude, nous ne créons donc pas de samskaras en nous-mêmes ou chez les autres.
Quand nous sommes témoins, nous avons encore des pensées, mais nous ne les jugeons pas ni ne luttons contre elles. Elles sont pareilles à des nuages qui passent. Mais qui est ce témoin? Ce n’est pas le mental. C’est l’habitant intérieur, l’âme.
Le Bouddha a exprimé cette idée du témoin d’une manière légèrement différente. À propos de la méditation, il parlait de «la mémoire juste». On pourrait aussi l’appeler la mémoire incolore. Elle n’a aucun parti pris. La mémoire juste est véridique, libératrice, authentique. Nous y accédons par la méditation, où nous apprenons à être de simples témoins, et à tout laisser surgir puis repartir.
Le résultat? Un mental clair, et la capacité de discernement et de prise de décisions judicieuses qui l’accompagnent. Pour parvenir à cet état, il nous faut traverser la région du cœur et maîtriser les émotions associées aux cinq éléments des points du cœur. Au cours de ce processus, toutes les complexités samskariques et les impuretés liées à ces émotions se dénouent et se dissipent. Nous arrivons à un état de clarté et d’authenticité.
En général, il est bien plus difficile de se défaire des souvenirs que des possessions matérielles.
Accumuler des souvenirs, c’est comme accumuler des biens matériels. Les souvenirs sont nos possessions mentales, et ceux auxquels nous sommes particulièrement attachés sont comparables à nos biens matériels les plus précieux. En général, il est bien plus difficile de se défaire des souvenirs que des possessions matérielles. Nous les laissons définir notre personnalité et déterminer notre identité. Notre ego s’y embourbe.
Alors, sommes-nous prêts à lâcher nos souvenirs? D’ailleurs, ce serait lâcher quoi? Non pas l’information associée à chaque souvenir, mais essentiellement l’interférence émotionnelle, le nœud dans le champ énergétique, pour que la charge puisse s’éliminer. Quand le passé cesse d’être continuellement présent, notre présent peut vraiment devenir incolore.
C’est le cleaning qui dissipe la charge émotionnelle et dénoue les influences du passé. C’est donc lui qui nous permet de redessiner notre destinée.
L’une des pratiques les plus puissantes jamais conçues en psychologie yogique est le cleaning Heartfulness. Il sert à supprimer les impressions et à dégager le champ de la conscience de toutes les complexités et impuretés qui s’y sont accumulées. On les élimine quotidiennement du corps subtil en utilisant le pouvoir de la pensée, tout comme on élimine la saleté du corps physique en prenant une douche. On se sert également du cleaning pour yama, le premier membre de l’ashtanga yoga de Patanjali, qui est l’élimination des tendances indésirables. La possibilité de supprimer ces tendances existe bel et bien, sinon pourquoi Patanjali inclurait-il yama dans l’ashtanga yoga? J’ajoute cette remarque à l’intention de certains pratiquants persuadés qu’il n’est pas possible d’enlever les samskaras.
Méthode simple et efficace, le cleaning a révolutionné le yoga dès sa première application dans les années 1940 par Ram Chandra de Shahjahanpur. C’est le cleaning qui dissipe la charge émotionnelle et dénoue les influences du passé. C’est donc lui qui nous permet de redessiner notre destinée.
Mémoire implicite et explicite, illusion et vérité
L’une des découvertes les plus intéressantes en neurosciences concerne la façon dont les souvenirs se forment. Les scientifiques parlent de la mémoire implicite, qui se forme inconsciemment, et de la mémoire explicite, qui se forme consciemment. Lorsque nous réagissons émotionnellement à une situation, par la peur par exemple, l’émotion circule généralement très rapidement, en court-circuitant les centres cognitifs corticaux du cerveau. Notre système utilise d’autres voies nerveuses, comme les neurones du cœur qui, via le nerf crânien pneumogastrique (le dixième), parviennent directement aux structures sous-corticales, telles les amygdales cérébelleuses. Les impulsions électromagnétiques du cœur ont également une influence immédiate sur l’ensemble du corps et au-delà. Par conséquent, lorsqu’un sentiment ou une réaction émotionnelle sont impliqués dans la formation d’un souvenir, ou dans sa remémoration, c’est la mémoire implicite qui est à l’œuvre; celle-ci ne peut être gérée ni effacée par des processus mentaux cognitifs, puisque ces souvenirs ne passent pas par les centres cognitifs. Il s’agit d’une autre forme de mémoire.
On peut néanmoins traiter cette mémoire par le cœur, en particulier par les pratiques de méditation sur le cœur et de nettoyage de ce dernier, car il est capable de réagir instantanément. Ce n’est que par des pratiques basées sur le cœur que nous pouvons apprendre à maîtriser nos émotions et accéder ainsi à des souvenirs réels et à une mémoire «incolore».
La mémoire est subjective et le mental amoral
Dans Le fleuve de la conscience, Oliver Sacks montre que les hallucinations et l’imagination empruntent les mêmes voies de mémorisation dans le cerveau que les perceptions «réelles». Les neuroscientifiques sont arrivés à la conclusion qu’il n’existe aucun mécanisme dans le mental qui garantisse la réalité et l’authenticité des perceptions. En effet les neurosciences ne révèlent aucun « facteur guide », ou conscience, déterminant ce qui est bien (pramana) ou mal (viparyaya), ni ce qui est réel ou imaginaire (vikalpa). Dans ce sens, le mental est amoral.
La mémoire se construit de façon très subjective. Ce que nous ressentons comme vrai dépend autant de notre imagination que de nos sens, car les événements et les situations sont des expériences vécues. La nature même de la mémoire est faite de subjectivité. Et les souvenirs naissent non seulement de l’expérience, mais aussi des échanges avec les autres.
Alors, d’où vient la réalité ? D’où vient la vérité ? Encore une fois, nous en revenons au rôle du cœur. À travers les pratiques Heartfulness nous ressentons le cœur comme l’organe subtil qui nous dit ce qui est réel et ce qui ne l’est pas, ce qui est bien ou mal, etc. Ce qu’il en découle est très profond: quand nous écoutons le cœur, nous découvrons que la voix de la conscience devient plus claire, et qu’ainsi nous pouvons distinguer les choses et les différencier avec facilité. Mais attention! Cela ne fonctionne que lorsque le cœur est pur, que lorsque le champ de la conscience est pur.
Finalement, plus nous parvenons à purifier notre conscience, en éliminant les samskaras à la racine de nos complexités mentales, plus nous avons de chances d’avoir une mémoire limpide et incolore, donc un mental sain, une sensation de bien-être général… et la destinée que nous choisissons.